C'est dimanche, jour de réveillon, et les écoles ont fermé leurs portes.
Dans les maisons, les enfants attendent - sans patience aucune - l'arrivée des cadeaux au pied du sapin. On imagine l'excitation à son comble autour des guirlandes clignotantes.
Depuis quelques jours déjà, il se tramait des choses passage Beslay et mardi, on a vu pousser deux conifères ventrus sur les murs de la maternelle. Tout de même ! c'est le premier Noël du Jardin des connaissances, il fallait bien deux arbres pour fêter ça.
D'ailleurs, nous avions préparé notre coup et mercredi, des enfants du centre de loisirs de l'école Pihet venaient, accompagnés de Ludivine et Elisabeth, décorer les deux sapins du passage. Moi, je prenais des photos et c'était vraiment réjouissant de les regarder coller des bons vœux et de la gaité sur les carreaux de Beslay.
Très belles fêtes à tous de notre part à tous.
À ceux qui dorment dehors, on offre nos arbres multicolores et celui du Jardin partagé Truillot.
Enfin, puisque ce blog est en vacances : bon passage de l'an au passage Beslay et à tous ceux qui l'aiment.
C'était mardi dernier, 28 novembre. L'offensive du froid avait commencé et la veille, la pluie nous avait fait craindre que la sortie serait gâchée. Mais ce matin-là, un froid vif et sec régnait dans le quartier et cela tombait bien : 24 enfants de moyenne et grande section de la classe de Valérie à l'école Beslay, avaient rendez-vous avec le génie de la Bastille. Nous sommes partis 28 à pieds sous le ciel bleu, emmitouflés dans nos anoraks, en s'arrêtant régulièrement pour que les enfants devinent ou apprennent l'itinéraire, se repèrent un peu entre la droite et la gauche et ans le quartier.
Au début bien sûr, même en arrivant sur le boulevard Richard-Lenoir, on ne le voyait pas très bien le génie. Alors on s'est approché et comme l'on fait avec l'appareil photo, on a "zoomé".
Comme ça :
Comme ça :
et encore comme ça :
Quand on est enfin arrivés sur la place après avoir croisé beaucoup de nids, on l'a tous vraiment bien observé. On a vu qu'il était perché sur une jambe (la droite), qu'il avait les bras en l'air avec une chaîne brisée d'un côté et un flambeau de l'autre, et qu'il brillait dans le soleil. Du coup, on a tous essayé de se tenir comme lui et on a constaté que ce n'est pas très facile de tenir les bras en l'air et sur une jambe. Les passants riaient de nous voir en déséquilibres.
Quand on a eu fini notre tour de la place de la Bastille, regardé les bateaux sur le port de l'arsenal et posé sur les marches de l'opéra, nous sommes descendus prendre le métro. On a enchaîné sans traîner et avec grand plaisir les 28 rotations du tourniquet et sur le quai, nous avons laissé passer quelques rames, trop occupés que nous étions à contempler les fondations de l'ancienne prison. Parce que les prisons, c'est comme les maisons : elles ont des fondations et les fondations, ce sont des murs enfoncés dans la terre comme les racines d'un arbre. Et c'était plutôt étonnant parce qu'à l'allée, sur le boulevard Richard-Lenoir qui recouvre le Canal Saint-Martin, nous marchions au-dessus des péniches, tandis qu'au retour, dans le métro, nous regardions les pierres d'un mur de l'ancienne prison, au-dessous des voitures et des piétons.
Merci aux enfants de moyenne et grande section de la classe de Valérie à l'école Beslay. Maintenant, il réfléchissent sur le thème de la liberté.
Tout ceci, bientôt, se verra sur les murs du passage Beslay.
"Cette après-midi là, on vadrouillait dans le quartier pour cueillir des mangues. On avait abandonné la technique qui consistait à lancer des pierres pour les décrocher des arbres le jour où Armand avait envoyé un caillou un peu trop loin et avait endommagé la carrosserie de la Mercedes de son père."
Gaël Faye, in Petit pays. ed. Gallimard
S’exiler, c’est partir loin de ce qui est familier, c’est devoir parfois oublier jusqu’au parfum des fleurs d’un jardin, jusqu’au goût d’un fruit que le transport aura, de toutes façons, dénaturé.
Parfois, loin de sa terre natale, la simple vue d’un arbre vous ramène au pays. Viennent alors défiler des images en cascade, des souvenirs de tous les âges, mais toujours de ce lieu-là, celui qui accueille cette variété d’arbres-là. Finalement, cet arbre synthétise à lui seul un pan entier du pays qui nous manque. Alors, on entend son rire d’enfant, on voit la lumière dans un regard, on sent la chaleur sur sa peau et on respire les parfums absents. La littérature des écrivains exilés est pleine de ces fleurs d'exils qui les enracine encore au pays quitté.
Accueillir l’autre, c’est aussi lui laisser assez de place pour qu’il ait la possibilité de nous enrichir de ce qu’il sait et de ce qu’il aime. C'est pourquoi, quand le Collectif Beslay et le Jardin partagé Truillot ont été consultés pour répondre à un appel à projets de la mairie sur le thème Accueillir au jardin, ils ont pensé que ce serait intéressant de donner la parole à ceux qui viennent d’ailleurs, d’un autre pays ou d’une autre région. Les faire parler de cette contrée au travers d’un fruit, d'une fleur, d'un légume ou d'un arbre et d’un souvenir qui lui est associé serait aussi l'occasion pour tous d'apprendre sur la biodiversité et sur la diversité tout court.
Biodiversité et pédagogie du partage ont semble-t-il fait mouche et le projet a été retenu. La réponse est tombée en début d'été.
Nous avions donc cela au programme en rentrant de vacances.
Justement, alors que j’étais à peine de retour, les libraires de La Tête ailleurs m’ont montré l’édition en avant-première d’un album Jeunesse écrit par une habitante du quartier, Le Jardin du dedans-dehorsde Chiara Mezzalama (Editions des éléphants. Illustrations : Régis Lejonc). "Tu vas adorer le texte, m’ont-elles dit avec enthousiasme." Le rapport au végétal, les dessins , tout !"
Dans ce livre, Chiara raconte le jardin persan de son enfance et la vie d'une enfant, dedans et dehors. De fait : texte et illustrations sont au top ! et je fus conquise.
J’ai donc pris contact avec Chiara qui a rejoint Fleurs d’exils avant que nous en ayons planté la première graine. L’enthousiasme, c'est contagieux par ici.
Elle et moi, nous allons donc commencer par collecter vos témoignages. Pour chaque plante que vous me raconterez, je créerai un visuel que les écoles pourront imprimer et peindre en autant d’exemplaires que souhaités. Ces créations fleuriront bien sûr les murs peints du Jardin des connaissances, passage Beslay. Passants et habitants du quartier pourront ainsi découvrir des plantes d’ailleurs, incarnées par des voisins proches ou plus lointains.
Ensuite, lorsque nous aurons terminé ce travail de collecte et de création collective, nous nous attèlerons à la réalisation d’un catalogue des fleurs d’exils. Un livre unique, visible à la bibliothèque du jardin partagé Truillot, et dont une copie sera consultable en ligne.
Peut-être — qui sait ? — une déclinaison imprimée ?
Vous pouvez nous envoyer vos récits par mail en cliquant ici. et rejoindre la page facebook de Fleurs de Rives. Vous pouvez aussi venir vous faire interviewer lors des ateliers Fleurs d'exils qui seront organisés dans le Jardin partagé Truillot.
Fleurs d'exils sera lancé officiellement dimanche prochain,
à l’occasion de la Fête des jardins et de l’agriculture urbaine.
Avec la librairie La Tête ailleurs et Chiara Mezzalama, nous vous attendons au jardin partagé Truillot devant l’église Saint-Ambroise (75011), dans le square des moines de Thibirine, à partir de 14 heures.
Thibirine, un mot perse justement, qui signifie jardin potager. Voilà qui tombe bien puisque Chiara vous racontera les jardins persans, ces jardins clôts, ces coins de paradis à l’abris des chaos du monde.
Elle vous lira aussi quelques pages du Jardin du dedans-dehors, paru hier en librairie. Ce sera donc le moment d'enrichir votre bibliothèque avec cet album dédicacé par Chiara (dès 6 ans).
Puis, vous pourrez venir nous raconter les plantes de votre pays.
Enfin, on partira en fanfare visiter le square Gardette et le passage Beslay avant de revenir écouter la Chorale solidaire de la rue du Carillon et le concert du Saint-Pères band. Bonne Fête des jardins !
Hier soir, quelques parents se sont retrouvés pour goûter dans le jardin partagé Truillot.
Comme ils étaient quelques-uns réunis là et que les enfants avaient fait leur retour sur la pelouse, on a écrit des messages pour les élèves et les équipes pédagogiques des écoles Pihet et Beslay.
Tandis que tous discutaient en sirotant des jus de fruits et grignotaient des gâteaux, Demba, James et moi, nous nous sommes éclipsés pour aller planter des fleurs que le Jardin partagé nous gardait en réserve.
Puis, est venue la dernière nuit de vacances pour les enfants ; certains ont du avoir quelque peine à s'endormir…
Au matin, ce fut sans doute souvent préparatifs soignés, impatiences et cavalcades…
On imagine quelques petits plantés devant la porte, cartable sur le dos, s'agaçant que le temps n'aille pas un tout petit peu plus vite pour qu'enfin arrive ce jour tant attendu où l'on est tellement fier d'être devenu plus grand !
Alors pour toute cette impatience, pour cette soif de grandir, de se retrouver, de jouer, d'apprendre et de partager, le Jardin des connaissances avait revêtu ce matin ses habits de rentrée : dans les jardinières à l'entrée du passage, des fleurs avaient poussé qu'on ne trouve que dans ce jardin-là et seulement le jour de la rentrée : des locaces du premier jour !
Profitez-en vite : elles durent ce que durent les hémérocalles : une journée.
Un peu plus haut, on avait planté les messages des parents du Jardin partagé Truillot inscrits sur deux pancartes. Sur le sol qui avait été nettoyé par la mairie et qui séchait à peine, des fleurs fraîches commençaient à gagner le bitume.
Ce matin, c'étaient la première rentrée de septembre au Jardin des connaissances.
Très belle rentrée à tous et bienvenue au Jardin des connaissances, passage Beslay, à Paris XI.
Aujourd'hui, c'est la rentrée des enseignants et l'on imagine que cela commence à sérieusement s'activer derrière les murs des écoles Beslay et Pihet : on prépare la classe, on met en place les éléments pédagogiques sur lesquels s'appuieront les enseignements de l'année, on retrouve les collègues… L'école est encore calme et l'on entend ses pas claquer dans les couloirs… Depuis l'extérieur, je me demande comment c'est, la classe avant que l'école commence… De son côté, le Collectif beslay est rentré depuis une semaine et avec ses amis du Jardin partagé Truillot, il n'a pas chômé. On vous en dit plus rapidement, mais notez déjà dans vos agendas : Le 13 septembre, sera ouvert le vote au budget participatif de la ville de Paris, auquel nous soumettons un nouveau projet pour progresser encore dans la transformation du passage Beslay. Au programme : poursuite de ce qui a été engagé l'année dernière dans la partie piétonne pour la rendre plus propre, plus conviviale et davantage végétalisée, création d'une rampe d'accès handicapés pour l'école Beslay et la mise en place d'aménagements pour mieux partager la partie ouverte à la circulation automobile entre les écoles, les passants, les riverains, les deux roues, les voitures et les véhicules de livraison. On aura besoin de vos votes en masse ; alors diffusez, partager, inondez les réseaux sociaux et faites-nous un brin de buzz avec les # de rigueur : #budgetparticipatif #passagebeslay Merci. Pour en savoir plus sur la deuxième phase de transformation du passage Beslay proposée dans le cadre du Budget participatif 2017, c'est PAR ICI. On vous réserve aussi quelques surprises dans le cadre de cette campagne… on vous en dit plus très vite. Vous pouvez déjà retenir la date du 24 septembre pour la Fête des jardins. On ne devrait pas s'ennuyer ce jour-là entre Truillot et Beslay… Il n'est même pas exclu qu'on déborde sur le Boulevard des coccinelles. A suivre (…) Là, tout de suite, on vous laisse, la rentrée des enfants c'est lundi et on a quelques petites choses à faire d'ici là. Bonne rentrée à tous.
Fin d’après-midi dans le passage Beslay. Mardi soir.
L’ombre d’un ailante — ces grands arbres qui rafraîchissent le passage les mois d’été — se dessine délicatement couleur sépia sur le pignon qui ferme au nord la petite placette devant l’école maternelle. Comme un soleil sur un dessin d’enfant, il surligne dans son bord supérieur droit, ce mur que nous venons d’habiller.
Bienvenue dans le Jardin des connaissances !
Flashback.
Lorsqu’en décembre dernier, je présentais aux autres membres du Collectif Passage Beslay, le projet de création du Jardin des connaissances, j’avais découpé la partie piétonne en deux espaces : au nord, l’allée des connaissances ; au sud le Jardin des connaissances. Pourtant, jusqu’à ce mardi soir, je restais sur ma faim : l’allée et le jardin se ressemblaient trop. Je n’avais pas réussi à suffisamment différencier ces deux espaces.
Et puis, le 26 juin, sont arrivées les premières fleurs gigantesques créées par les travailleurs handicapés de l’Esat-Anrh Maurice Pilod avec Marie, leur professeur d’arts-plastiques.
D’abord, elles me désorientèrent par leur taille démesurée, avant de m’éblouir par leur gaité et leur liberté.
Pourtant, j’étais embarrassée. Je craignais de manquer de place, que l’équilibre soit rompu et que les travaux des enfants, plus légers, ne soient étouffés par l’éclat de ces créations. Je comptais toutefois sur un joker : il restait un pignon à peindre au dessus des jardinières du fond, pour lequel nous avions demandé l’autorisation de coller à la copropriété. L'assemblée générale se réunissait le soir même…
Bingo ! Le 27 juin autour de 18h30, alors que nous dressions la table pour accueillir les convives de la soirée Hommage à Jean Zay, Magali m’annonçait que "oui, OK pour tout : le collage tout de suite et une treille l’année prochaine."
Alors, malgré la pluie qui nous a cernés toute la semaine, on a dignement inauguré le Jardin des connaissances : on a rendu hommage à Jean Zay et on a fêté l'été avec Yu Man qui dort désormais à la librairie la Tête ailleurs. On l’a promené de Beslay au jardin partagé Truillot et avec lui, on a continué à créer pour les murs du passage, en dessinant sur des fleurs ou sur la nappe.
On était super motivés ; nous savions qu’on ajouterait un cadeau Bonus avant de partir en vacances: créer quelque chose tout de suite sur le mur du fond, pour que cela ressemble de toute évidence à un jardin peint, pour que ça saute aux yeux dès la rue de la Folie-Méricourt ; pour qu’on ait là, un jardin et là-haut, une allée.
Ainsi, hier et avant-hier, avec Margot et Alexandre R., on a collé les derniers dessins et textes, réparé ce qui avait été saccagé et renforcé ce qui devait l’être. Ce matin, je savoure la fin de ma mission, même si je sais qu'elle ne s'arrêtera pas vraiment avant longtemps. Et je suis comblée : les enfants et les parents sont heureux, les personnes âgées se réjouissent des murs qui changent, on ralentit le pas dans le passage pour lire les murs. Mieux encore, on redécouvre la beauté du passage Beslay. Désormais, au Jardin des connaissances, nos yeux se promènent sur les pierres et l’on remarque enfin les ombres que dessinent les ailantes sur les façades du passage. Ces murs sont des écrans où la lumière danse et quand le soleil rase les toits de la rue de la Folie-Méricourt, c'est un enchantement de feuillage !
La création du Jardin des connaissances est donc terminée. Merci encore une fois à tous ceux qui ont créé les plantes de ce jardin au fil des mois. Et merci aussi aux street artistes qui sont venus enrichir ce jardin : Fred Le Chevallier, Le Bichon, Low et ceux dont j'ignore le nom. C'était un bonheur de vous découvrir comme des fleurs inattendues. Mais qu'on se le dise : c'est maintenant que tout commence. Maintenant que le Jardin des connaissances est né, nous avons la responsabilité d'en prendre soin. Il en va toujours ainsi avec les jardins.
Parce qu’on ne va pas se mentir : le Jardin des connaissances est exposé aussi à des vents mauvais. On y boit, on y fume, on y squatte, on y pisse, on y saccage… Seules les fleurs sauvages ont pu croître, les autres ont été systématiquement pillées ou arrachées. Trois arbres décorés ont dû être réparés ainsi que plusieurs feuilles et des abeilles, un arbre n'a pas pu l'être, etc.
C’est pour cela que le Jardin des connaissances n’est pas une œuvre statique, pour cela que c’est un jardin : nous savons que ses plantes, végétales ou peintes, peuvent périr et devront être remplacées. Nous savons qu’il faudra en prendre soin.
C'est pour faire vivre ce jardin, qu’à la rentrée, nous engagerons de nouveaux projets, notamment pour végétaliser davantage et mieux devant l’école maternelle, et pour continuer de raconter les écoles et le quartier en poétisant les murs du passage.
En attendant, soyons tous vigilants.
Alors si, cet été, quand les écoles seront fermées, vous trouvez dans le passage, des branches d’arbres ou des feuilles décorées par les enfants qui auraient été arrachées, merci de les déposer à La Bel Recup’, juste en face du passage dans la rue de la Folie Méricourt, ou à la librairie La Tête ailleurs (42 rue de la Folie Méricourt).
Quand on récupère les morceaux, souvent, on peut réparer. A défaut, c'est plus compliqué.
Surtout merci à tous. Vous tous, mes chers voisins et désormais compagnons de jardinage, amis de cœur (de la fleur). Merci d'avoir rendu possible cette création collective qui révolutionne — je crois pour longtemps — mon approche artistique. Vous n'avez pas idée de l'immense bonheur qui m'étreint quand je pense à ce que nous avons créé ensemble : du lien social, la fierté des écoles, des enfants et de leurs parents… Surtout, il me semble qu'en créant ce jardin, par le truchement imprévisible de l'art, un quartier tout entier, avec les écoles et l'implication de multiples acteurs généreux et soucieux de vivre ensemble, a repris possession d'un bout d'espace publique. C'est juste énorme ! Ah Socrate tu as tord ! L'art est excessivement utile. C'est le poète qui a raison : "Dans nos ténèbres, il n'y a pas une place pour la beauté. Toute la place est pour la beauté. (René Char)". Bienvenue au Jardin des connaissances.